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Immobilier français par un résident belge : de l’acquisition à la transmission

Jérémy Gackiere - Senior Estate Planner – Segment belgo-français
Si vous êtes à la recherche d’une résidence secondaire, la France réunit beaucoup d’atouts : proche de la Belgique, avec un climat attrayant et une gastronomie réputée. Découvrez dans cet articles les démarches à entreprendre si vous désirez acquérir un bien immobilier en France et le transmettre plus tard.

L’acquisition d’un bien immobilier en France peut s’avérer complexe et onéreuse. Il est donc primordial de procéder à une analyse circonstanciée au préalable.

La France demeure l’une des destinations privilégiées des Belges pour l’acquisition d’une résidence secondaire bien que la fiscalité immobilière n’ait cessé d’y croître ces dernières années. En effet, les règles fiscales applicables de la détention à la transmission peuvent parfois s’avérer complexes et onéreuses en l’absence d’organisation préalable. D’autant plus que les lois et la jurisprudence n’ont cessé d’évoluer en la matière créant ainsi une certaine confusion dans l’esprit des investisseurs.
Pourtant, la souplesse de la loi fiscale belge combinée aux subtilités des lois fiscales françaises permettent une détention dans des conditions optimales pour autant que l’investissement soit préalablement réfléchi.
La présente publication a pour objectif de synthétiser la fiscalité applicable aux différents stades de la vie d’un projet d’investissement immobilier en France par un résident belge et d’y apporter des réflexions permettant une optimisation.

I. Les frais d’acquisition et taxes récurrentes liées à la détention du bien

L’acquisition d’un bien ancien est soumise à divers taxes communément appelées « frais de notaire » représentant environ 7,5 % du prix d’achat. En outre, des taxes locales sont dues annuellement. Il s’agit de la taxe foncière et de la taxe d’habitation.
  • la taxe foncière : elle vise la détention des propriétés bâties et non bâties. Sa base d’imposition est constituée par la valeur locative cadastrale diminuée d’un abattement de 50%. Cette valeur cadastrale est calculée en fonction des loyers réels à la date du 1er janvier 1970 et fait l’objet d’une ré indexation annuelle.
  • la taxe d’habitation : elle vise les personnes qui ont la jouissance de propriétés bâties. La base d’imposition est constituée par la valeur locative cadastrale des locaux. Des abattements et exonérations existent notamment pour la résidence principale. A l’inverse, les résidences secondaires subissent des majorations allant de 5 à 60%.

II. L’impôt sur le revenu

En France, la détention d’une résidence secondaire fait l’objet d’une imposition au titre de l’impôt sur le revenu uniquement si des locations sont effectuées alors qu’en Belgique, la valeur locative du bien doit être déclarée à l’impôt des personnes physiques que le bien soit loué ou non.

A. En France

La location en meublé ne relève pas de la catégorie des revenus fonciers, à la différence des locations nues mais de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) dont la détermination de la base imposable est plus favorable. Nous développerons ici la location meublée exercée à titre non professionnel.
1. La détermination de la base imposable
Différents régimes existent en la matière selon l’importance des revenus générés :
  • Le régime du micro-BIC : permet de bénéficier d’un abattement forfaitaire de 50 % sur le montant brut des revenus déclarés, dans une limite de 70.000 €. Avec ce forfait, aucune charge ne peut être déduite. Ce régime s’applique de plein droit aux contribuables effectuant des locations saisonnières.
  • Le meublé de tourisme : permet de bénéficier d’un abattement forfaitaire de 71% sur le montant brut des revenus déclarés, dans une limite de 176.200 €. Avec ce forfait, aucune charge ne peut être déduite. Ce régime optionnel nécessite le respect de certaines conditions administratives.
  • Le régime du réel : sont déductibles toutes les charges inhérentes au bien immobilier ainsi que les annuité d’amortissements. La déductibilité sera toutefois limitée au prorata de l’affectation du bien à l’activité de location. Ce régime implique des obligations comptables et l’inscription au registre du commerce et des sociétés.
2. L’imposition du résultat
Le résultat imposable est ensuite taxé au barème de l’impôt sur le revenu :
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Une spécificité est applicable aux non-résidents français. En effet, le taux de taxation minimum qui leur est applicable ne peut être inférieur à 20% pour la fraction de revenus inférieure à 27.794 € et 30% pour la fraction de revenu supérieure.
A noter que des prélèvements sociaux sont également dus. Ils sont de 7,5 % lorsque le contribuable est résident de l’EEE et non affilié à la sécurité sociale française et de 17,2 % lorsque le contribuable est affilié à la sécurité sociale française.
En conclusion, le résultat imposable est taxé au taux minimum de 27,5% sur la fraction de revenu s’élevant à 27.794,00 € et au taux de 37,5 % au-delà.

B. En Belgique

En Belgique, les revenus immobiliers de source française sont exonérés conventionnellement d’impôt des personnes physiques. Toutefois, les résidents belges sont tenus de déclarer leurs revenus mondiaux afin de déterminer le taux effectif d’imposition qui leur est applicable. En matière immobilière, il y a lieu de déclarer la valeur locative figurant dans les avis d’imposition de taxe foncière française.
Attention au risque de double imposition des SCI en Belgique : il n’est pas rare que les résidents belges aient opté, pour l’investissement au travers d’une société dite « translucide » fiscalement applicable notamment aux sociétés civiles immobilières.
Ces sociétés sont dotées de la personnalité juridique mais les redevables de l’impôt sont les associés de ces sociétés en vertu du principe de « translucidité ». Cette fiction fiscale française a fait l’objet de nombreuses contestations par l’administration fiscale belge qui a fini par convaincre la Cour de cassation en 2016 de rallier sa position.
Désormais, en Belgique ces revenus doivent être appréhendés fiscalement comme des revenus mobiliers dès lors qu’une distribution est effectuée au profit d’un associé résident belge. Il en résulte une situation de double imposition dans la mesure où ces revenus ont déjà fait l’objet d’une imposition en France au titre des revenus immobiliers ou au titre de l’impôt sur la plus-value immobilière lorsque la société translucide a procédé à la vente du bien.
Solution : Une nouvelle directive européenne ayant pour objet de régler les différends fiscaux au sein de l’Union européenne est récemment entrée en vigueur en France et en Belgique. Elle pourrait solutionner ce problème de double imposition.

III. L’imposition des plus-values immobilières

Il s’agit du traitement fiscal applicable aux personnes physiques et associés de sociétés translucides lors de la vente de leur bien immeuble.

A. La détermination de la plus-value brute

La plus-value imposable se détermine donc par la différence entre le prix de vente et le prix d’acquisition majoré de certains frais.
  • Le prix de cession corrigé : il s’agit du prix mentionné dans l’acte de vente. Il peut être minoré des frais acquittés par le vendeur pour la mise en vente du bien mais doit être majoré des frais et taxes mis à la charge de l’acquéreur.
  • Le prix d’acquisition majoré : le contribuable a le choix entre les frais d’acquisition réellement acquittés ou un forfait de 7,5 % si le bien a été acquis à titre onéreux. Enfin le prix d’acquisition peut être majoré par les frais de travaux réalisés par une entreprise par un forfait de 15% après 5 ans de détention uniquement.

B. Les abattements pour durée de détention

La plus-value brute fait ensuite l’objet d’abattements selon la durée de détention dont la progressivité diffère en matière d’impôt sur le revenu et en matière de prélèvements sociaux.
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C. L’imposition de la plus-value nette

La plus-value diminuée des abattements pour durée de détention fait ensuite l’objet d’une taxation à l’impôt sur le revenu au taux de 19 % et aux prélèvements sociaux au taux de 7,5% pour les personnes résidentes de l’EEE, non affiliées à la sécurité sociale française.
Une surtaxe de 2 à 6 % est due également lorsque le montant de la plus-value nette après abattements pour durée de détention applicables au titre de l’impôt sur le revenu, est supérieur à 50.000 €.
Enfin, la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus est due au taux de 3 à 4% par les contribuables dont le revenu fiscal de référence est supérieur à 250.000 € (pour une personne seule) ou 500.000 € (pour un couple).

IV. L’impôt sur la fortune immobilière

L’impôt sur la fortune immobilière (IFI) vise les personnes physiques non-résidentes fiscales françaises dont le patrimoine immobilier net situé en France est supérieur à 1.300.000 € au 1er janvier de chaque année. L’assiette imposable se compose des biens immobiliers détenus en direct mais également les biens détenus de manière indirecte. L’imposition s’opère par transparence lorsque les actifs immobiliers sont détenus par des sociétés, et ce, quel que soit le nombre de niveaux d’interposition.
Il est précisé que les personnes mariées, pacsées ou en concubinage notoire font l’objet d’une imposition commune. Les actifs des enfants mineurs entrent également dans la base imposable de leurs parents.
Enfin, en cas de démembrement, l’usufruitier est redevable de la valeur en pleine propriété du bien sauf en présence d’usufruit légal du conjoint survivant.

A. Le tarif de l’IFI

fraction de la nvaleur nette taxable du patrimoine
Il existe une décote pour les patrimoines compris entre 1.300.000 € et 1.400.000 €. Elle se calcule de la manière suivante : Décote = 17.500 € - 1,25 % P (P est égale à la valeur du patrimoine nette taxable).

B. Les spécificités en matière de déduction de passifs

En matière de déduction des passifs, les règles varient considérablement selon que le bien immobilier est détenu en direct ou par l’intermédiaire d’une société.
En effet, en matière de détention en directe, le principe est que les passifs ne sont pas déductibles. La loi prévoit que seules sont déductibles de la base imposable, les dépenses d’acquisition, de réparation et d’entretien, d’amélioration, de construction, de reconstruction ou d’agrandissement.
De surcroit, des règles particulières existent en matière de crédit in fine (bullet) et la déductibilité des crédits n’est que partielle pour les patrimoines supérieurs à 5.000.000 €.
A l’inverse, en matière de passif contracté par des sociétés, le principe est que les passifs sont déductibles, sauf exceptions.

V. Les droits de mutation à titre gratuit

La transmission d’un bien immobilier situé en France par un résident belge peut s’avérer onéreuse en l’absence d’organisation préalable. Toutefois, de nombreuses possibilités permettent d’en réduire le coût.

A. Les règles de compétence applicables entre la France et la Belgique

Le traitement fiscal diffère selon que le bien est transmis par donation ou par succession et selon que le bien est détenu par une société ou en direct.
1. La transmission par succession
Ces différences de traitement résultent notamment de la Convention franco-belge applicable en matière successorale :
  • La détention en direct : les biens immobiliers sont imposables en France mais la Belgique (Etat de résidence du défunt) peut imposer ces biens aux droits de succession à condition, d’imputer les droits français sur ses propres droits de succession.
  • La détention indirecte : les parts de sociétés détenant un actif immobilier en France ne sont imposables qu’en Belgique, si la résidence fiscale du défunt y est établie.
2. La transmission par donation
Il n’existe pas de Convention préventive de double imposition entre les deux Etats en matière de donation. Par conséquent, il y a lieu de faire application des droits internes dont les règles varient également selon que le bien est détenu en direct ou par une société :
  • La détention en direct : seule la France est compétente pour imposer la donation. La Belgique ne peut imposer cette transmission.
  • La détention indirecte : la donation portant sur ces parts est imposable en France que la société soit de droit français ou belge, mais également en Belgique. En Belgique, si la donation ne fait pas l’objet d’un enregistrement (en cas d’enregistrement taux de 3% ou 3,3 % selon les Régions), les parts feront l’objet d’une taxation aux droits de succession mais uniquement si le donateur ne survit pas trois ans à la donation.

B. Les régimes de taxation en France et en Belgique

En Belgique, les actifs peuvent faire l’objet d’une taxation aux droits de succession à un taux marginal d’imposition de 27% ou 30 % selon les Régions.
Le barème ci-dessous est applicable en France en matière de donation et de succession en ligne directe (parents-enfants).
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Ce même barème applicable se renouvèle tous les 15 ans et s’applique après application d’un abattement en ligne directe de 100.000,00 €. Cet abattement se renouvèle tous les 15 ans également.
Il est précisé que dans l’hypothèse d’une donation avec réserve d’usufruit, seule la valeur de la nue-propriété fait l’objet d’une taxation aux droits de mutation à titre gratuit en France. La valeur de la nue-propriété, évaluée par application de l’article 669 du Code général des impôts, dépend de l’âge de l’usufruitier.

VI. Conclusion

L’acquisition d’un bien immobilier en France par un résident belge peut s’avérer complexe et onéreuse eu égard à la superposition des lois fiscales et à leur instabilité. Il est donc primordial de procéder à une analyse circonstanciée préalablement à une acquisition en France. En tout état de cause, deux modes d’anticipation s’avèrent incontournables dans ce contexte transfrontalier; la technique de l’achat scindé et le financement par crédit bancaire.
La première consiste à consentir préalablement à l’acquisition, une donation de liquidités au profit des enfants afin que ces derniers acquièrent la nue-propriété de l’actif immobilier. Les parents acquièrent quant à eux, l’usufruit de l’actif.
La seconde est le financement de la pleine propriété par un crédit bancaire car l’une des spécificités du droit interne français réside dans la possibilité de déduire certains passifs de la base imposable aux droits de mutation à titre gratuit.
Ces techniques nécessitent cependant d’être accompagné d’un professionnel en la matière particulièrement dans un contexte où l’administration fiscale française développe constamment un arsenal juridique afin de lutter contre l’optimisation fiscale abusive.
Si en revanche la transmission n’a pas été anticipée lors de l’acquisition et que l’actif immobilier à vocation à rester dans le cadre familial alors, il pourrait être conseillé d’opérer des donations le plus tôt possible.
Enfin, les investisseurs ayant eu recours à des sociétés translucides peuvent enfin espérer mettre un terme aux situations de double imposition depuis l’entrée en vigueur de la Directive UE 2017/1852.
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